Les métamorphoses animales dans l’Islam populaire médiéval et moderne djinns dieux le monde visible invisible

François Clément

Texte intégral

  • 2 Voir, sur ce point, N. Élisséeff, Thèmes et motifs des Mille et Une Nuits. Essai de classification(...)
1Je vais parler de « vraies » métamorphoses, c’est-à-dire de sauts intergénériques ayant permis la transformation d’individus réels et attestés appartenant au genre Homo en individus tout aussi réels et attestés appartenant aux genres Felis, Canis, Aquila, Natrix, etc. Je laisserai donc de côté les métamorphoses légendaires, celles que l’on trouve dans la littérature de fiction et les contes (comme les Mille et Une Nuits)2, ainsi que celles affectant des individus appartenant aux genres Aggelos et Genius qui, n’ayant pas d’habitus spécifique, peuvent revêtir toute forme.
2J’avoue que je suis un peu gêné d’exclure ainsi les anges et les djinns car, pour l’islam, il s’agit d’êtres tout à fait réels : cela fait partie du credo. Disons qu’ils appartiennent à un monde qui n’est pas exactement celui de la matière sublunaire, leur essence subtile, presque immatérielle, les éloignant du règne animal pour les rapprocher des phénomènes physiques (en l’occurrence, la transformation de l’énergie) : ils sont en effet décrits, les premiers comme étant des êtres de lumière, les seconds des êtres de feu clair sans fumée.
3En revanche, ils sont dotés de la capacité d’apparaître aux humains sous la forme d’êtres que ces derniers sont en mesure de percevoir visuellement, mais aussi de concevoir :
  • personnages anthropomorphes comme Gabriel, l’ange de la Révélation ;
  • animaux, comme les anges des quatre premiers Cieux, cheval, vache, vautour, aigle, coq (illustration 1) ;
  • êtres hybrides comme cet ange à 70 têtes qui apparaît au troisième ciel, ou encore les quatre anges supportant le Trône de Dieu (le premier a le visage d’un homme, le deuxième la tête d’un lion, le troisième d’un aigle et le quatrième d’un taureau)3. On les représente parfois sous la figure d’un personnage tétracéphale (illustration 2).
  • 4 Cela inclut le rat, le putois ou le hérisson. Voir F. Clément, « Insectes et autres arthropodes se (...)
4Les djinns, pareillement, peuvent revêtir forme animale : chameau, cheval, mulet, singe, serpent, scorpion, paon, pigeon… Toutes les combinaisons sont possibles : mi-chat mi-chien, éléphant à tête de lion, etc. Une tradition prophétique classe les djinns en trois catégories dont la première, justement, est composée de serpents, scorpions et reptiles (c’est-à-dire de tout ce qui vit au ras du sol)4.
  • 5 Sur les principaux thèmes du merveilleux dans la faune, voir T. Fahd, « Le merveilleux dans la fau (...)
  • 6 al-Idrīsī, Kitāb nuzhat al-muštāq, éd. et trad. partielles par M. Hadj-Sadok, al-Maġrib al-carabī (...)
  • 7 al-Zuhri, Kitāb al-ğacrāfiyya, M. Hadj-Sadok (éd.), Bulletin d’Études Orientales, XXI, Damas, 1968 (...)
5Je laisserai de côté, pour les mêmes raisons, les êtres merveilleux5 et les monstres, qu’ils soient réels, comme l’animal Burāq, jument ailée à tête de femme (illustrations 1 et 2) qui transporte le Prophète lors du Voyage Nocturne et de l’Ascension à travers les sept Cieux ; ou plus problématiques, comme les habitants des îles lointaines, aux limites du monde, à propos desquels les auteurs arabes médiévaux rapportent le témoignage de marins sans, toutefois, en garantir l’authenticité. Ainsi, par exemple, de ces êtres « qui ressemblent à des femmes, ayant des crocs qui ressortent de leur bouche, des regards foudroyants, des jambes comme en bois brûlé, parlant une langue inintelligible6 » et qui habitent l’île des Ogresses (ğazīrat al-Sacālī), quelque part dans l’océan Atlantique. Ou des femmes du Wāq Wāq, à l’autre bord du monde, vers l’est, dans la mer de Chine, qui sont en réalité les fruits d’un arbre et qui donc, malgré leur incomparable beauté, se révèlent n’être qu’une masse de chair qu’on s’empresse d’enterrer lorsque, parvenues à maturité, elles tombent au sol et se corrompent en empuantissant l’atmosphère7.
  • 8 D. G. Shepherd, « A Dated Hispano-Islamic Silk », Ars Orientalis, II, 1957, p. 373-382.
6On pourrait avancer l’idée que les êtres merveilleux et les monstres sont des êtres en métamorphose saisis au moment de leur passage d’une forme à l’autre. J’en veux pour indice la soierie de Vic (Catalogne) conservée au Museum of Art de Cleveland, pièce sans doute almériane de la première moitié du xiie siècle (illustration 3). On y voit deux êtres affrontés qu’on a interprétés comme étant des sphinges8. Toutefois, un examen attentif permet de constater qu’il s’agit de deux harpies juchées à contresens sur la croupe de deux lions dont elles masquent la tête. Pourquoi ne pas y voir, alors, des harpies en train de se transformer en sphinges (ce qui laisserait deviner les étapes – les stades, dirait le naturaliste – qui mènent à l’imago) ?
  • 9 Voir l’article « Micradj » (B. Schreike, J. Horovitz et al.) Encyclopédie de l’Islam, 2e éd., Leyd (...)
  • 10 Yāqūt al-Rūmī, Mucğam al-buldān, Beyrouth, Dār Ṣādir, 1986, V, p. 381, col. g.
7La place de ces êtres n’est pourtant pas dans mon corpus car leur réalité physique ne fait pas l’unanimité. L’épisode du Voyage Nocturne et de l’Ascension du Prophète divise les théologiens. Si l’opinion majoritaire qui fonde l’orthodoxie argumente que le Prophète a chevauché pour de bon Burāq, c’est-à-dire pleinement éveillé, avec son corps et son esprit, d’autres considèrent qu’il a voyagé par l’esprit, en songe, et qu’il faut donc parler d’une vision9. Quant au Wāq Wāq, il s’agirait selon le géographe Yāqūt (mort en 1228), à qui on ne la fait pas, d’un pays de légende10.
  • 11 al-Idrīsī, op. cit., § 8, p. 70 (texte) et p. 60 (trad.).
8Tout ceci est un peu décevant car l’être mystérieux, en tout cas dans le monde sublunaire, nous laisse parfois entrevoir, derrière l’image qu’on en dessine, un fruit ou un animal exotique. Essayez, par exemple, de vous figurer cette nation peuplant l’île de Qalhān, dans l’océan Atlantique : ses membres ont forme humaine et tête animale, ils « plongent dans la mer, en retirent les bêtes dont ils peuvent se saisir et les mangent11 ». Ne correspond-elle pas, en termes de taxonomie, à l’honorable famille des Phocidés ?
  • 12 Voir E. Baer, Sphinxes and Harpies in Medieval Islamic Art, Jérusalem, Israel Oriental Society, 19 (...)
9Il faut pourtant l’exclure du corpus, à cause de son statut incertain ou trop exclusivement animal. Rejetons, également, les êtres de pure fantaisie, les chimères, c’est-à-dire ces sphinges et harpies précédemment évoquées, sans parler des sirènes des mers orientales. Dommage, car les artistes musulmans les ont volontiers figurées (illustrations 4 à 6)12.
  • 13 Ibn Manẓūr, Lisān al-cArab, s. v.
10Je ne retiendrai pas, non plus, les métamorphoses subies, qui ne sont pas de véritables métamorphoses au sens biologique, puisque le changement de forme est le résultat d’un processus ayant son origine ou sa volonté à l’extérieur de l’individu, souvent contre son gré. C’est ce que sous-entend le terme masḫ, lequel désigne certes la « métamorphose » en arabe (du moins, c’est l’équivalent proposé dans les langues européennes), mais que le lexicographe glose par « transformation d’une forme en une autre plus laide13 ». Il utilise à cet effet le terme transitif taḥwll (« transformer ») plutôt que le réfléchi taḥawwul (« se transformer »). On comprend vite, par l’exemple donné (« Que Dieu le métamorphose en singe ! »), qu’il s’agit d’une punition infligée à ceux qui ont mérité le courroux divin (la tradition cite des polythéistes et des juifs, des mécréants et des rebelles, mais aussi toutes sortes de personnages ayant enfreint l’ordre social, notamment les agents du fisc malhonnêtes).
  • 14 Je remercie Yves Hersant d’avoir attiré mon attention sur ce point.
11La métamorphose du type masḫ comporte des degrés, comme toute peine. La plus sévère est la transformation en singe ou en porc : ces deux espèces passent, en effet, pour particulièrement antipathiques et hideuses. Mais il y a aussi le chien (pas terrible non plus, surtout quand il est affublé de quatre yeux et court en permanence sans parvenir à étancher sa soif). On trouve également le lézard, la tortue, l’anguille, l’ours, l’éléphant, le lièvre, le vautour, le corbeau, la chouette, la huppe, le frelon, l’araignée, la crevette, la souris… On a d’ailleurs beaucoup discuté pour savoir si de tels animaux sont les descendants d’humains métamorphosés (le lézard et la souris ont particulièrement retenu l’attention), ou bien s’ils existaient avant la sanction ; s’ils sont, par conséquent, des sortes d’humains déclassés (argument avancé : la « main » du lézard, vestige de la forme antérieure), ou s’ils n’ont fait qu’accueillir dans leurs rangs des êtres remodelés à leur image et dépourvus de descendance. Nous sommes là en présence du dilemme bien connu entre la forme/image et la matière/nature, la question étant de savoir si la transformation de la première implique ou pas celle de la seconde14.
  • 15 R. Basset, Mille et un contes, récits et légendes arabes, III, Légendes religieuses, Paris, Librai (...)
12La transformation d’un humain en animal peut, aussi, résulter d’une sorte de vœu inconscient. Le fils irrespectueux qui traite à tout propos sa mère d’ânesse perd l’usage de la parole et se met à braire. Mieux : les témoins alertés constatent que son cou est devenu pareil à l’encolure d’un baudet. L’anomalie de cette transformation inaboutie est soulignée par le rapide trépas du puni (sans doute, ne méritait-il guère mieux)15.
  • 16 Sur tout ceci, voir l’article « Masḵẖ », (C. Pellat) Encyclopédie de l’Islam, op. cit., s. v.
13Ajoutons que la peine de métamorphose frappe également les anges et les djinns et même certains animaux, comme le serpent, ci-devant dromadaire que Dieu a condamné à ramper sur le sol16.
  • 17 Voir T. Fahd, « La naissance du monde selon l’islam », Sources Orientales, I (La naissance du mond (...)
  • 18 Voir Basset, op. cit., p. 619.
14De fait, les créatures vivantes, qu’elles soient humaines ou animales, vivent dans une proximité qui facilite, sans doute, le passage d’une forme à une autre. L’ordre du monde est d’ailleurs garanti par les bêtes. Ce sont des anges à figure animale, nous l’avons vu, qui supportent le trône de Dieu. C’est un serpent qui, tout autour, figure le cosmos. C’est un taureau, certes unique en son genre (il possède 40 000 têtes, autant d’yeux, de naseaux, de bouches, de langues et de pattes), qui porte la Terre sur son dos et ses cornes. C’est une baleine qui porte ce taureau. C’est une petite bête (non identifiée) qui rappelle la baleine à l’ordre lorsque celle-ci est tentée de secouer sa charge. Ce sont des scorpions, des vautours, des tortues et des serpents qui peuplent les sept marches de l’enfer en compagnie de monstres de toutes sortes17. Et lorsque les deux derniers hommes descendront à Médine à la recherche de leurs semblables, ils ne trouveront que des renards et des chats, lesquels survivront donc à l’espèce humaine (ne serait-ce que provisoirement)18.
  • 19 Le lecteur francophone en trouvera la liste dans F. Gabrieli, Mahomet, coll. Le Mémorial des Siècl (...)
  • 20 Voir É. Dermenghem, Le culte des saints dans l’islam maghrébin, Paris, Gallimard, 1982 (1re éd. 19 (...)
15Le prophète de l’islam n’échappe pas à cette proximité avec le monde animal. Je ne reviendrai pas sur la jument Burāq et je me contenterai d’indiquer que ses sept chevaux, ses trois mules de selle, ses deux ânes, ses trois chamelles de course, ses dix chamelles de lait et ses sept chèvres ont toutes et tous reçu un nom personnel que la tradition a pieusement enregistré19. On sait aussi que Mahomet défendait de maltraiter les bêtes, de les mutiler ou de les tuer sans nécessité. Le jour du Jugement, enseigne-t-il, les animaux domestiques porteront témoignage contre leurs maîtres cruels : n’a-t-il pas vu, en enfer, une femme condamnée à être griffée sans répit par le chat qu’elle avait laissé mourir de faim ? À l’inverse, il y aura récompense pour le bien fait aux animaux. C’est ainsi qu’une prostituée gagne le paradis pour avoir donné à boire à un chien assoiffé20.
  • 21 Basset, op. cit., p. 238.
  • 22 Ibid., p. 271.
  • 23 Ibid., p. 321.
  • 24 Ibid., p. 388.
  • 25 Ibid., p. 368.
16Le Prophète prêche l’exemple quand il ordonne de rendre à leur mère les oisillons capturés21. À son imitation, le calife omeyyade cUmar II b. cAbd al-cAzīz (717-720) enterre un serpent mort trouvé sur le bord du chemin (il est vrai qu’il le soupçonne d’être un djinn fidèle, c’est-à-dire un bon musulman)22. S’il le faut, la Providence intervient. L’alouette aveugle tombée du nid reçoit nourriture et boisson surgies de nulle part23, tandis que le bédouin qui a brisé intentionnellement la patte d’une gerboise se casse aussitôt la jambe24. Citons encore le cas du calife abbasside al-Mustanṣir (1226-1242) : la maladie qui devait l’emporter est contractée à l’occasion d’une chasse au cours de laquelle ses hommes ont forcé, sur son ordre, le gibier réfugié sous la protection d’un saint homme25.
  • 26 Ibid., p. 300 ; voir également É. Dermenghem, Vie des saints musulmans, éd. définitive, Paris, Sind (...)
  • 27 Basset, op. cit., p. 321 ; voir également É. Dermenghem, Vie des saints, op. cit., p. 90-81.
  • 28 Voir Basset, op. cit., p. 235-237, 254, 327, 460.
17C’est également au cours d’une partie de chasse qu’Ibrāhīm b. Adham, le premier maître soufi du Khorassan, au viiie siècle, renonce au monde après qu’une voix puis l’animal qu’il poursuivait l’eurent admonesté (on parle d’un lièvre, d’un renard ou d’une gazelle)26. L’alouette aveugle évoquée plus haut est à l’origine de la conversion à la vie mystique du célèbre soufi égyptien Ḏū l-Nūn (ixe siècle)27. On pourrait citer d’autres cas de conversion provoquée par un animal, ici un lézard, là un loup (diverses mentions), ailleurs un scorpion28.
  • 29 Ibid., p. 254, 468, 523.
  • 30 Ibid., p. 303.
18Car les animaux semblent bien plus que les hommes respectueux de la loi divine. Ceci autorise le loup à reprocher au chef mekkois Abū Sufyān son incrédulité ; le chacal à un šayḫ du djebel Néfousa, dans l’actuelle Libye, son manque de charité ; et le chien à l’ascète ses entorses à la règle29. Ibn Adham prend d’ailleurs pour modèle la résignation des chiens de la ville de Balḫ30.
  • 31 Ibid., p. 264-65 (pour punir l’assassin de cAlī), 444 (pour punir le méchant beau-père), 527 (pour (...)
  • 32 Ibid., p. 295, 327, 370, 373.
19Rien de surprenant, donc, à ce que les animaux soient l’instrument du destin, tantôt pour exécuter la sentence de mort (citons l’aigle, le serpent, le scorpion)31, tantôt pour accorder miséricorde : le corbeau nourrit l’homme prisonnier des brigands ; le scorpion, décidément ambivalent, protège du serpent un jeune homme (pourtant ivre mort) avec la complicité de la tortue ; le milan laisse tomber une bourse aux pieds du miséreux ; le lion délivre Abū Ḥamza al-Ḫurasānī de la fosse où il est tombé32.
20Les saints hommes (et les saintes femmes), plus que d’autres, bénéficient de cette familiarité avec les animaux au point que la frontière entre espèces semble bien mince. De là à faire le saut, la chose est facile. Il y a véritablement, plus qu’une complicité, une quasi fraternité dans la soumission au Créateur. Je laisse cet aspect, pour l’instant, en attente.
  • 33 C’est la seule compétence originale, avec la lexicologie et la poésie, que Ṣācid l’Andalou reconna (...)
21Je voudrais, en effet, terminer ce tour d’horizon, en rappelant deux choses. D’abord, l’abondance de la nomenclature animale dans le lexique de l’astronomie et de l’astrologie, deux domaines de prédilection des Arabes et donc des musulmans à l’époque classique33. Que ce soit les noms des constellations des deux hémisphères ou ceux des signes du zodiaque, l’animal est omniprésent. Cette abondance des figures animales dans le ciel physique (et dans les arrêts du destin) doit être rapprochée, il me semble, de celle des figures animales qui peuplent le ciel eschatologique : je n’insiste pas.
  • 34 Voir Clément, « Insectes. », op. cit., p. 177-182.
22Deuxièmement, on note une réelle fascination pour les insectes sociaux, abeilles et fourmis. Il n’est pas indifférent que chaque espèce ait sa sourate en bonne et due forme (Coran XVI et XXVII) et non de façon anecdotique (comme l’araignée, Coran XXIX). Depuis Aristote et Pline, on s’extasie sur le génie géométrique des premières, qui défie le savant, et sur le génie politique des deuxièmes, qui défie le prince. On sent bien que les unes comme les autres sont un modèle indépassable, un signe donné par Dieu. Les fourmis forment, assurément, le peuple « muslim » (« soumis » à Dieu, « musulman ») le plus irréprochable34.
  • 35 Voir ibid., p. 168.
  • 36 Basset, op. cit., p. 239.
  • 37 Ibid. ; É. Dermenghem, Culte des saints, op. cit., p. 100.
  • 38 Voir Clément, « Insectes… », op. cit., p. 166-167.
23En fin de compte, peu d’animaux suscitent la malédiction. Il y a le termite, accusé d’avoir révélé aux djinns la mort de Salomon35, et la sauterelle, bien sûr – entendons le criquet pèlerin36. Encore que Dieu n’accède pas à la prière de Mahomet qui souhaite les exterminer et qu’une anecdote montre Rifācī, le fondateur des derviches hurleurs, s’abstenir de bouger pour ne pas priver d’ombre une sauterelle installée près de lui37. Même le scarabée n’est pas un être méprisable, malgré sa répugnante coprophilie38. Car ce qui domine chez l’homme pieux et a fortiori chez le sage ou le soufi, c’est un profond respect pour la vie. Dieu n’est-il pas al-Ḥayy, le Vivant, et l’animal al-ḥayawān, « ce qui est en vie » ?
  • 39 Ibid., p. 163-164, 167-168.
  • 40 Ibid., p. 163. Il est vrai que, pour les insectes hémimétaboles (comme la punaise), les stades larv (...)
24On comprend alors, et ces détours n’auront pas été inutiles, que la métamorphose appartient à l’ordre naturel des choses. La lecture des Anciens (Aristote, Pline) jointe à l’observation des insectes holométaboles, comme le papillon (notamment le bombyx)39, n’a pu que conforter l’idée qu’il s’agissait d’un phénomène somme tout banal – quitte à émettre des hypothèses que la biologie moderne n’a pas validées, la transformation de la puce en punaise, par exemple40.
25Dans cette proximité avec le monde animal, les marginaux de la foi (ascètes, mystiques et illuminés) occupent une place singulière. Renversons la proposition : la reconnaissance par les animaux est un des signes les plus certains de leur élection. Cela fait partie des charismes (karamāt) nécessaires. En voici quelques exemples.
  • 41 Basset, op. cit., p. 470.
  • 42 Ibid., p. 446.
26À l’instar de Moïse confiant la garde de son troupeau à un loup quand il dort, le saint marocain Abū Bakr confie ses ouailles au chacal lorsqu’il se rend en ville pour la prière41. Dans l’aura du saint homme retiré au désert (étape indispensable), la réconciliation des espèces s’avère comme une évidence ou, plutôt, l’être humain découvre au désert, en même temps que la paix de l’âme, la grande paix de Dieu entre les créatures. L’ours qui apporte à Sahl b. cAbd Allāh l’eau nécessaire à ses ablutions fait partie « d’une troupe d’animaux sauvages entièrement livrés à Dieu par amour et par confiance42 ». On pourrait dire que les bêtes sont non seulement les compagnons des saints (illustration 7), mais aussi leurs véritables maîtres.
  • 43 Ibid., p. 383-384 ; É. Dermenghem, Vie des saints, op. cit., p. 250-251 ; id., Culte des saints, op (...)
  • 44 Il n’avait pas fait maigre ce jour-là. Voir É. Dermenghem, Culte des saints, op. cit., p. 100 ; au (...)
27J’en veux pour preuve un épisode bien connu de la vie du grand mystique andalou et futur patron de Tlemcen, Šucayb b. Ḥusayn, dit Abū Madyan (Boumédienne), né vers 1126, mort en 1198. Un jour, les chiens affectueux sur son passage et la gazelle qui partage sa retraite se détournent de lui. Il en cherche la raison et finit par découvrir qu’on a glissé, par charité, quelques pièces de monnaie dans la loque qui lui sert de manteau. Quelle souillure ! Il s’en débarrasse : aussitôt, la gazelle revient et les chiens lui font fête43. Une mésaventure comparable était arrivée à al-Ḥasan al-Baṣrī, l’un des premiers soufis (il est mort en 728), alors qu’il rejoignait sur la montagne la dévote du Pur Amour, Rābica al-c Adawiyya (m. 752)44.
  • 45 Voir Basset, op. cit., p. 462, à propos de Ḫayr le Tisserand (mort en 933), un des maîtres de Šībl (...)
28Outre les animaux cités, auxquels j’ajouterai, pour mémoire, l’écrevisse45, trois catégories d’animaux entretiennent avec ces pieux personnages un rapport privilégié : les reptiles, les oiseaux et les fauves. Dans le grand nombre d’anecdotes qui l’illustrent (de manière assez répétitive, il faut le reconnaître), j’en ai retenu trois.
  • 46 Ibid., p. 451.
29Abū Isḥaq al-Ṣuclūkī trouve sur son chemin un jeune homme mourant allongé sur un lit de fleurs odorantes. L’anachorète s’en étonne et apprend que ce sont les bêtes féroces et les reptiles du désert qui les ont apportées46.
  • 47 Ibid., p. 347.
30L’un des fils du calife Hārūn al-Rašīd (786-809) a renoncé au monde, au grand dam de son père. Pour essayer de le fléchir, il appelle un oiseau qui vient se poser sur sa main puis sur celle du souverain47.
  • 48 Ibid., p. 315, n. 1. Autres exemples concernant les lions, ibid., p. 274 sq., 361, 380, 431, 454.
31Ibn Adham est en route pour la Mekke à l’occasion du pèlerinage. Il fait halte dans une caverne où vit un lion. Celui-ci, bien qu’affamé, lui offre l’hospitalité48.
32Bref, entendre le langage des animaux, converser avec les oiseaux et vivre en paix avec les fauves, c’est un peu la moindre des choses pour un individu qui a voué sa vie à comprendre et à aimer : l’amour du Créateur n’implique-t-il pas d’aimer ses créatures ? Mieux : l’amour humain lui-même, hors de toute forme de religiosité, n’embrasse-t-il pas la totalité du vivant, comme l’atteste, avant l’islam, la vie du poète Qays b. Mulawwaḥ, alias Mağnūn, le « fou » de Layla, lequel se réfugia dans le désert au milieu des bêtes sauvages (illustration 8) ?
  • 49 Voir V. Loubignac, « Un saint berbère : Moulay Bou’Azza. Histoire et légende », Hespéris, XXXI, Pa (...)
33À cet égard les lions, surtout dans l’islam maghrébin, sont préférentiellement la pierre de touche de la sainteté. Il me suffira de renvoyer à la biographie du grand saint berbère du Maroc, Abū Yaczā Yāl al-Nūr (Mūlay Bū cAzza), mort en 1177, le maître d’Abū Madyan. On le voit entouré de lions dociles et d’oiseaux familiers, avec lesquels il vit en parfaite harmonie. Cette sérénité édénique diffuse autour de lui : à sa porte, les fauves fraternisent avec les ânes des pèlerins49. Citons également Sīdī Belyūt, vénéré à Casablanca, dont le nom même, Abū l-luyūṯ (« l’homme aux lions ») est suffisamment explicite ; ou encore Sīdī Raḥḥal, le santon de l’Atlas (illustration 9).
  • 50 Voir É. Dermenghem, Culte des saints, op. cit., p. 19-21.
34On ne s’étonnera donc pas de ce que certains saints se soient vu accorder la faculté de se transformer en animal, les petits saints locaux, surtout, car les saints « sérieux » (c’est-à-dire savants) y répugnent, considérant que miracles et prodiges sont du domaine de la futilité, voire de l’orgueil50. Je n’entrerai pas dans la discussion de savoir si l’animal qui se matérialise est le saint lui-même, sa projection mentale ou son djinn familier : la typologie est facile à établir, mais le rattachement d’un événement particulier à un type l’est moins car les avis divergent et les phénomènes d’hybridation sont courants. Peu importe, du reste. Pour les témoins, l’apparition est réelle : c’est le saint qu’ils reconnaissent dans l’animal.
  • 51 Ibid.., p. 226-228.
  • 52 Histoire des colonies françaises et de l’expansion de la France dans le monde, G. hanotaux et A. Ma (...)
35Sīdī Aḥmad b. Yūsuf est, sans conteste, l’un des walī les plus populaires dans tout l’Ouest algérien et de larges parties du Maroc. Affilié à la confrérie sāḏiliyya, il vécut à la charnière du xve et du xvie siècle et joua un rôle politique en soutenant, contre la dynastie des Banū Zayān de Tlemcen, la cause de Ḫayr al-dīn (Barberousse), le nouveau maître d’Alger pour le compte des Ottomans. Lorsqu’il mourut en 1524, son cadavre fut attaché à sa mule et enterré là où l’animal s’arrêta, en l’occurrence un tas d’immondices à l’entrée de Miliana. On érigea par la suite un sanctuaire à cet emplacement, qui devint un lieu de pèlerinage fréquenté. Il le demeurait encore lorsque Émile Dermenghem le visita, vers le milieu du xxe siècle (même s’il note que certains rites avaient disparu sous la pression des réformistes). Derrière le tombeau du saint, se trouve notamment celui de sa mule, percé de trous où les malades passent leurs mains et leurs pieds dans l’espoir de guérir (ce qui n’est pas sans évoquer la dévotion au chien saint Guignefort telle qu’elle se pratiquait jadis à Saint-Broladre, Ille-et-Vilaine). Mais voici où je veux en venir : lorsque les soldats français prirent possession du lieu en 1840, ils virent un lion près du tombeau du saint et, le lendemain, un grand serpent descendre des étages et disparaître dans la fontaine51. Apparition de Sīdī Ahmad b. Yūsuf ? Lion sacré du sanctuaire ? Âme ou génie du saint (sous la forme du serpent) ? Le fait est que, sur les 1 100 à 1 200 hommes de la garnison, 800 périrent de maladies dans les mois qui suivirent52. L’événement fut de nature à frapper les esprits.
  • 53 É. Dermenghem, Culte des saints, op. cit., p. 98.
  • 54 Basset, op. cit., p. 377-378.
36En effet, la métamorphose a souvent valeur d’avertissement. Sīdī cAlī Ambārik, patron de Colea près d’Alger, a l’habitude d’apparaître sous la forme d’un lion noir lorsqu’il n’est pas content de ses fidèles53. Sīdī cAbd Allāh b. Manṣur utilise un serpent énorme pour tourmenter le sultan de Tlemcen, homme injuste. Sa mission terminée, le reptile vient se glisser entre le vêtement et la peau du saint homme dont il est sans doute le génie ou le double (le dédoublement est une des variantes de la métamorphose54).
  • 55 Voir le récit infra, Annexes, A.
  • 56 Voir le récit infra, Annexes, B.
37Il existe, symétriquement, des métamorphoses de serviabilité. Arslān b. Yacqūb (mort en 1150), saint patron de Damas, se transforme en faucon pour être agréable à son maître Aḥmad al-Rifācī et à l’ami de celui-ci, Abū Madyan (il devait gagner à cette occasion son surnom d’al-Bāz al-ašhab, le Faucon cendré)55. La sollicitude va parfois jusqu’au ravaudage des accrocs de la vie conjugale. Sīdī Abū l-Ṭayyib s’étant plaint du mauvais caractère de sa femme, son ami Sīdī Mḥammad al-Sabc (« le Lion »), santon marocain de la fin du xvie siècle, n’hésite pas à surgir chez les époux sous la forme d’un chat puis, à petits maux les grands remèdes, sous celle d’un lion, ce qui a pour effet de ramener la mégère à de meilleurs dispositions56.
  • 57 Voir F. Clément, « Rumeurs, croyances et émotions populaires dans l’Islam d’Occident au Moyen-Âge  (...)
38Ajoutons que les saints ne sont pas les seuls à bénéficier du don de métamorphose. Des personnages énigmatiques, mi-agitateurs politiques mi-illuminés, disposent de ce pouvoir. L’histoire de cAlī al-Ğazīrī vaut qu’on la raconte. Ancien apprenti tālib almohade chassé pour hétérodoxie, il parcourt le Maroc et gagne de l’audience auprès des laissés pour compte des grandes villes. En 1190, traqué par les agents du pouvoir, il prend le maquis, avant de réapparaître de l’autre côté du détroit de Gibraltar, mais sous la forme d’un chien, d’un âne, d’un chat. L’affaire prend de telles proportions que les gens du petit peuple en viennent à soupçonner tout matou inconnu. Appréhendé à Málaga sous sa forme humaine, transféré à Séville puis relâché grâce à la vénalité d’un juge, l’homme-chat finit par tomber à Murcie où les autorités se hâtent de le crucifier dans un profond soupir de soulagement : on avait eu très peur57.
39En effet, si la métamorphose du saint rassure d’une certaine façon, puisqu’elle ne remet pas en cause l’ordre social – elle en corrige seulement les excès –, celle du rebelle fait trembler : et si tous les chats, par exemple, se révoltaient contre le prince ? Ou si tous les rebelles, tous les traîne guenille, se transformaient en chats ?
  • 58 Date de la correspondance au recto. Les séries portant la mention « Lévy Fils et Compagnie, Paris  (...)
  • 59 Le costume du personnage européen, au deuxième plan à gauche, comme le chapeau qu’on aperçoit à l’ (...)
40Je terminerai cette évocation des métamorphoses animales par une photographie (illustration 10). Il s’agit d’une carte postale éditée vers 191758 par la maison Lévy Fils et Compagnie de Paris dans la série « Scènes et types », aux initiales LL, c’est-à-dire provenant du fonds constitué dans la capitale entre 1866 et 1900 par Moise Léon et Isaac Lévy. Elle porte le numéro 6228, avec le titre « Une Compagnie peu rassurante ». L’auteur de la prise de vue n’est pas mentionné, le lieu non plus. On peut simplement déduire des vêtements que nous sommes en Algérie. La date ? Deuxième moitié du xixe siècle59.
41On voit, au premier plan, une lionne couchée, placide, tenue en chaîne. Derrière elle, des hommes bien habillés posent pour le photographe. Ceux du premier rang sont assis en demi-cercle, à l’exception du personnage de droite. Ceux du second rang sont debout. Des curieux se pressent à l’arrière-plan. Il y a un Européen, à gauche, et sans doute un second, au fond, car on distingue la coiffe d’un chapeau rond.
42On ne saurait exclure que le fauve appartient à une troupe de saltimbanques ou à un notable. Toutefois, la tenue vestimentaire des assistants me semble trop soignée pour des montreurs d’animaux et trop ordinaire pour les serviteurs d’un grand personnage (on ne distingue, d’ailleurs, aucune arme). En outre, les hommes du premier rang (qui sont visiblement les gardiens de la lionne) ont plutôt la mine grave. Ils ne crânent pas, ils ne plaisantent pas. Seuls quelques individus dans le public, ainsi que l’Européen, qui sourit benoîtement, ont l’air de s’amuser, de prendre l’exhibition de la lionne pour un divertissement.
  • 60 Voir infra, Annexes, C ; également É. Dermenghem, Culte des saints, op. cit., p. 12 et surtout p. (...)
43Tout porte donc à croire que celle-ci n’est autre que l’animal sacré d’une zaouïa, c’est-à-dire une sorte d’alias du saint disparu. un nom vient alors à l’esprit, celui du patron des Flittas, Sīdī Muḥammad b. cAwda (xiiie ou xive siècle ?), l’ami des lions : les desservants de son sanctuaire ont promené de tels animaux de l’Oranais à l’Algérois jusqu’au milieu des années 2060.
44Si mon interprétation est correcte, nous tiendrions ici la preuve, celle qui manquait aux sceptiques : un cliché.

Annexes

Annexes

A. Histoire du Faucon gris

« On raconte que le šayḫ, l’Ami [de Dieu] Aḥmad al-Rifācī (Dieu soit satisfait de lui !) avait sa demeure à Umm cUbayda, près de la ville de Wāsiṭ [en Iraq]. Il était lié d’amitié fraternelle avec l’Ami de Dieu (qu’Il soit exalté !) Abū Šuc ayb b. al-Ḥusayn et il entretenait avec lui une correspondance. On dit que chacun saluait son camarade le matin et le soir et lui rendait le salut.
Le šayḫ Aḥmad avait des palmiers dans sa zaouïa. Une année, il récolta [les dattes], comme d’habitude, mais laissa un régime, en déclarant :
– Ceci est pour mon frère Šucayb.
Cette année-là, le šayḫ Abū Madyan effectua le pèlerinage. Les deux hommes se retrouvèrent à l’illustre Station du [mont] cArafât. Le šayḫ Aḥmad était accompagné de son serviteur Raslān=(Arslān).
Les deux [amis] devisèrent. Le šayḫ raconta l’histoire du régime [de dattes]. Raslān lui dit alors :
– Sur ton ordre, maître, je le lui apporte.
[Le šayḫ] donna sa permission. [Raslān] partit à l’instant, revint avec [le régime] et le déposa devant les deux hommes.
Les gens de la zaouïa rapportèrent que, le soir de la journée de cArafāt, ils avaient vu un faucon gris se poser sur le palmier, couper le régime en question et l’emporter dans les airs61. »

B. Histoire de la femme acariâtre

« Sīdī Abū l-Ṭayyib invita [un jour] Sīdī Mḥammad al-Sabc dans sa maison de Maysūra et se plaignit à lui du mauvais caractère de sa femme. Sīdī Mḥammad ordonna alors à son hôte d’allumer la lampe de sa chambre et de s’asseoir en récitant le nom de Dieu Tout-Puissant. Puis il pénétra par surprise chez les deux époux : surgissant d’abord d’une lucarne comme un chat, il revint ensuite sous la forme d’un lion. La femme prit la fuite. Elle alla se réfugier auprès de son mari, se blottir sous son aile protectrice. Alors Sīdī Abū l-Ṭayyib posa la main sur le fauve :
– Merci, lion ! lui dit-il, ça suffit.
Et le lion se retira62. »

C. Le lion de la Zaouïa

« Zemmora, le 28.09.1951 – Je venais à peine d’arriver à Zemmora que je vis défiler fièrement devant moi plusieurs cavaliers musulmans montés sur leurs cavales hennissantes. Leurs burnous écarlates ou immaculés retombaient lourdement de chaque côté de leurs selles où se jouaient des arabesques d’or et d’argent. Ils revenaient de la Zaouïa de Sidi Mohamed Ben Aouda qui attire chaque année des milliers de pèlerins. Cette terre aride, rocailleuse, est devenue un lieu saint. C’est là que vécut en anachorète, au milieu des bêtes fauves, priant, fuyant les hommes… et les femmes, Sidi Mohamed Ben Aouda. Ses vertus le firent reconnaître par les Flittas comme leur père spirituel. Après trente ans de vie de jeûne et de prière, le Très-Haut le rappela à lui. C’est alors qu’eut lieu le miracle. Les disciples du vénéré saint priaient autour de son tombeau quand un lion apparut. Stupeur et panique des dévots personnages. Mais le fauve entra dans l’édifice, et se coucha sur la pierre tumulaire. Quand les serviteurs du saint revinrent, il se laissa prendre sans difficulté. Les hommes de la Zaouïa n’ont pas manqué d’exploiter ce miracle, car ils vivent depuis uniquement d’oboles, et il fallut que leur dernier lion à demi-aveugle blessât un enfant et fût tué pour qu’ils ne promenassent plus par les tribus du bled l’adorateur muet de leur saint patron, Sidi Mohamed Ben Aouda63. »

Notes

2 Voir, sur ce point, N. Élisséeff, Thèmes et motifs des Mille et Une Nuits. Essai de classification, Beyrouth, Institut Français de Damas, 1949, p. 142-144.
3 Ils ne sont pas sans rappeler l’iconographie chrétienne des quatre Évangélistes encadrant le Christ en gloire.
4 Cela inclut le rat, le putois ou le hérisson. Voir F. Clément, « Insectes et autres arthropodes selon Qazwīnī », dans A. Ghouirgate et al. (éd.), Mélanges pour le 25e anniversaire des études arabes à l’Université de Toulouse-le Mirail, Toulouse, AMAM, 1998, p. 159-160.
5 Sur les principaux thèmes du merveilleux dans la faune, voir T. Fahd, « Le merveilleux dans la faune, la flore et les minéraux », dans M. Arkoun, J. Le Goff, T. Fahd et M. Rodinson, L’Étrange et le merveilleux dans l’Islam médiéval, Paris, Éditions J. A., 1978, p. 117-135.
6 al-Idrīsī, Kitāb nuzhat al-muštāq, éd. et trad. partielles par M. Hadj-Sadok, al-Maġrib al-carabī min Kitāb nuzhat al-muštāq li-l-Idrīsī, Paris, Publisud, 1983, § 4, p. 68 (texte) et p. 58 (trad.).
7 al-Zuhri, Kitāb al-ğacrāfiyya, M. Hadj-Sadok (éd.), Bulletin d’Études Orientales, XXI, Damas, 1968, p. 296-295, § 24 ; voir également Clément (François), « La cité des Femmes », dans Les Mille et une Nuits, Contes sans frontières, Toulouse, AMAM, 1994, p. 184-185.
8 D. G. Shepherd, « A Dated Hispano-Islamic Silk », Ars Orientalis, II, 1957, p. 373-382.
9 Voir l’article « Micradj » (B. Schreike, J. Horovitz et al.) Encyclopédie de l’Islam, 2e éd., Leyde, Brill, s. v. ; J.-E. Bencheikh, Le voyage nocturne de Mahomet, Paris, Imprimerie nationale, 1988, rééd. 2002.
10 Yāqūt al-Rūmī, Mucğam al-buldān, Beyrouth, Dār Ṣādir, 1986, V, p. 381, col. g.
11 al-Idrīsī, op. cit., § 8, p. 70 (texte) et p. 60 (trad.).
12 Voir E. Baer, Sphinxes and Harpies in Medieval Islamic Art, Jérusalem, Israel Oriental Society, 1965 ; C. Ewert, Hallazgos islámicos en Balaguer y la Aljafería de Zaragoza, Excavaciones arqueológicas en España, 97, Madrid, Servicio de Publicaciones del Ministerio de Educación y Ciencia, 1979, p. 166 sq.
13 Ibn Manẓūr, Lisān al-cArab, s. v.
14 Je remercie Yves Hersant d’avoir attiré mon attention sur ce point.
15 R. Basset, Mille et un contes, récits et légendes arabes, III, Légendes religieuses, Paris, Librairie orientale et américaine Maisonneuve frères, 1926, p. 280.
16 Sur tout ceci, voir l’article « Masḵẖ », (C. Pellat) Encyclopédie de l’Islam, op. cit., s. v.
17 Voir T. Fahd, « La naissance du monde selon l’islam », Sources Orientales, I (La naissance du monde), Paris, Le Seuil, 1959, p. 237-279.
18 Voir Basset, op. cit., p. 619.
19 Le lecteur francophone en trouvera la liste dans F. Gabrieli, Mahomet, coll. Le Mémorial des Siècles, Paris, Albin Michel, 1965, p. 332-333.
20 Voir É. Dermenghem, Le culte des saints dans l’islam maghrébin, Paris, Gallimard, 1982 (1re éd. 1954), p. 99 ; Basset, op. cit., p. 213 (autre exemple p. 437).
21 Basset, op. cit., p. 238.
22 Ibid., p. 271.
23 Ibid., p. 321.
24 Ibid., p. 388.
25 Ibid., p. 368.
26 Ibid., p. 300 ; voir également É. Dermenghem, Vie des saints musulmans, éd. définitive, Paris, Sindbad, 1981, p. 22-23.
27 Basset, op. cit., p. 321 ; voir également É. Dermenghem, Vie des saints, op. cit., p. 90-81.
28 Voir Basset, op. cit., p. 235-237, 254, 327, 460.
29 Ibid., p. 254, 468, 523.
30 Ibid., p. 303.
31 Ibid., p. 264-65 (pour punir l’assassin de cAlī), 444 (pour punir le méchant beau-père), 527 (pour punir le cultivateur qui a défié le Ciel).
32 Ibid., p. 295, 327, 370, 373.
33 C’est la seule compétence originale, avec la lexicologie et la poésie, que Ṣācid l’Andalou reconnaît aux anciens Arabes par rapport aux Indiens, Chaldéens, Perses, Grecs et autres peuples savants. Cf. ses Tabaqāt al-umam (Catégories des nations).
34 Voir Clément, « Insectes. », op. cit., p. 177-182.
35 Voir ibid., p. 168.
36 Basset, op. cit., p. 239.
37 Ibid. ; É. Dermenghem, Culte des saints, op. cit., p. 100.
38 Voir Clément, « Insectes… », op. cit., p. 166-167.
39 Ibid., p. 163-164, 167-168.
40 Ibid., p. 163. Il est vrai que, pour les insectes hémimétaboles (comme la punaise), les stades larvaires se distinguent mal, hormis la taille, du stade imaginal.
41 Basset, op. cit., p. 470.
42 Ibid., p. 446.
43 Ibid., p. 383-384 ; É. Dermenghem, Vie des saints, op. cit., p. 250-251 ; id., Culte des saints, op. cit., p. 72.
44 Il n’avait pas fait maigre ce jour-là. Voir É. Dermenghem, Culte des saints, op. cit., p. 100 ; autre exemple dans Basset, op. cit., p. 584.
45 Voir Basset, op. cit., p. 462, à propos de Ḫayr le Tisserand (mort en 933), un des maîtres de Šīblī (861-945).
46 Ibid., p. 451.
47 Ibid., p. 347.
48 Ibid., p. 315, n. 1. Autres exemples concernant les lions, ibid., p. 274 sq., 361, 380, 431, 454.
49 Voir V. Loubignac, « Un saint berbère : Moulay Bou’Azza. Histoire et légende », Hespéris, XXXI, Paris, Librairie Larose, 1944, p. 15-34 ; É. Dermenghem, Culte des saints, op. cit., p. 59 sq.
50 Voir É. Dermenghem, Culte des saints, op. cit., p. 19-21.
51 Ibid.., p. 226-228.
52 Histoire des colonies françaises et de l’expansion de la France dans le monde, G. hanotaux et A. Martineau (dir.), II, L’Algérie, par A. Bernard, Paris, Société de l’Histoire nationale et Librairie Plon, 1930, p. 210 ; C.-A. Julien, Histoire de l’Afrique du Nord. Tunisie-Algérie-Maroc, Paris, Payot, 1931, p. 600.
53 É. Dermenghem, Culte des saints, op. cit., p. 98.
54 Basset, op. cit., p. 377-378.
55 Voir le récit infra, Annexes, A.
56 Voir le récit infra, Annexes, B.
57 Voir F. Clément, « Rumeurs, croyances et émotions populaires dans l’Islam d’Occident au Moyen-Âge : quelques exemples », Annales de la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines, Université de Balamand (Liban), IX, 1999, p. 75-76.
58 Date de la correspondance au recto. Les séries portant la mention « Lévy Fils et Compagnie, Paris » ont débuté en 1914.
59 Le costume du personnage européen, au deuxième plan à gauche, comme le chapeau qu’on aperçoit à l’arrière plan, devraient permettre de préciser la date.
60 Voir infra, Annexes, C ; également É. Dermenghem, Culte des saints, op. cit., p. 12 et surtout p. 206-207. On remarque sur la photographie que les personnages du premier plan à droite sont des Noirs. Or la zaouïa de Sīdī Muhammad b. cAwda avait la particularité d’être desservie par des Noirs (ibid., p. 208).
61 Ibn Baṭṭūṭa, Tuḥfat al-nuẓẓār fī ġarā’ib al-amṣār wa-cağā’ib al asfār, Beyrouth-Le Caire, Dār al-kitāb al-lubnānī et Dār al-kitāb al-miṣrī, s. d., p. 70.
62 Mawlāy Aḥmad b. al-Ḥasan al-Sabcī, al-Durar al-saniyya fī aṣl al-sulāla al cImrāniyya al-Šaġrūšaniyya wa-l-Sabciyya, Fès, s. d., p. 4. Voir É. Clément, « Rumeurs… », op. cit., p. 77.
63 R. Blin, « Le lion de la Zaouïa », L’Écho d’Oran, 28 septembre 1951.

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